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Automne 2017 (volume 27, numéro 3)

Prise en charge de l'arthrite juvénile idiopathique dans les pays en développement

Par Mercedes Chan, MBBS, MHPE, FRCPC

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Située à une heure et demie de Johannesburg, en Afrique du Sud, la ville de Muldersdrift, déclarée patrimoine mondial par l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), est mieux connue sous le nom de " berceau de l'humanité " en raison du grand nombre de fossiles d'hominidés qui s'y trouvent. Quinze rhumatologues pédiatriques de partout dans le monde se sont réunis dans cet endroit mythique sur le plan de l'évolution musculosquelettique pour formuler des recommandations consensuelles pour la prise en charge de l'arthrite juvénile idiopathique (AJI) dans les pays en développement. Ce groupe de travail était formé de personnes qui désirent ardemment faire avancer la rhumatologie pédiatrique dans les pays en développement et qui travaillent dans les domaines de l'éducation médicale, de l'épidémiologie des maladies rhumatismales chez l'enfant, de l'immunologie et de l'établissement de lignes directrices cliniques. À titre de rhumatologue pédiatrique ayant un intérêt pour l'éducation médicale et la santé mondiale, j'ai eu le grand privilège de faire partie de ce groupe, en compagnie de deux autres rhumatologues pédiatriques canadiens, les Drs Ron Laxer et Ross Petty, qui ont tous deux largement contribué à l'éducation et à la formation médicales de rhumatologues pédiatriques partout dans le monde.

La Juvenile Idiopathic Arthritis Management for Less Resourced Countries Initiative (ou tout simplement « JAMLess ») a été mise sur pied par les Drs Christiaan Scott (Le Cap, Afrique du Sud) et Ricardo Russo (Buenos Aires, Argentine) et regroupe des représentants d'un peu partout sur la planète, notamment de l'Inde, de la Tanzanie, du Brésil, du Royaume-Uni, de l'Italie et de la Belgique. Grâce à une subvention de la Ligue internationale d'associations pour la rhumatologie, les Drs Scott et Russo se sont mis au travail, reconnaissant que les défis qui se présentaient à eux dans leur milieu clinique étaient différents de ceux qui se posent dans les pays développés où ils avaient tous les deux fait leurs études (le Dr Scott à Louvain, en Belgique, et le Dr Russo à Toronto, au Canada). En outre, bon nombre des recommandations déjà publiées en matière de prise en charge de l'AJI s'adressent principalement aux praticiens des pays développés et peuvent difficilement être mises en application dans les pays en développement. Dans ces pays, par exemple, les maladies endémiques comme la malaria, la tuberculose et le VIH/sida doivent souvent être prises en considération dans le diagnostic différentiel et la prise en charge de l'AJI. De plus, la pauvreté, les conflits sociaux et le manque de ressources restreignent encore plus l'accessibilité à des soins adéquats.

L'initiative JAMLess axera ses recommandations sur quatre aspects fondamentaux de la prise en charge de la maladie, soit 1) la prise en charge clinique (diagnostic, orientation vers un spécialiste et suivi); 2) l'éducation; 3) la défense des intérêts des patients et les réseaux; et 4) la recherche. Bien qu'il s'agisse d'un projet évolutif, nous espérons que ces recommandations pourront servir à tous les praticiens des pays en développement susceptibles de voir des cas d'AJI en tant qu'outil pour l'éducation médicale, la défense des intérêts et la prise en charge clinique. Au vu de la mondialisation rapide et de la faisabilité croissante des voyages internationaux, il est probable que ces recommandations finiront aussi par être utiles et applicables dans les pays développés. En outre, de telles ressources seront utiles à un grand nombre de gens des pays en voie de développement qui vont suivre une formation dans des pays développés comme le Canada, car les normes de soins et les ressources accessibles sont souvent différentes dans leur pays d'origine.

Des programmes de formation et divers établissements offrent aux professionnels de la santé de nombreuses occasions de participer à cette initiative mondiale en rhumatologie. Partout au Canada, bien d'autres professionnels de la santé contribuent à combler les besoins mondiaux en rhumatologie. Tous les ans, les Drs Simon Huang, Ian Tsang et Barry Koehler demandent à des boursiers en rhumatologie de l'Université de la Colombie-Britannique de les accompagner à Canton, en Chine, pour donner un cours de rhumatologie optionnel de deux semaines à des étudiants en médecine. Les Dres Rosie Scuccimarri, Ines Colmegna et Carol Hitchon (McGill et Université du Manitoba) se sont associées à des collègues au Kenya pour réaliser des études épidémiologiques sur les maladies rhumatismales en Afrique de l'Est. Ce ne sont là que deux exemples de participation de la communauté canadienne de la rhumatologie au mouvement « Rhumatologie sans frontières »1 qui vise à accroître l'accès aux soins et à la formation en rhumatologie dans le monde. Les établissements d'enseignement et les cliniciens des pays en développement sont désireux d'interagir avec les enseignants de toutes les facultés de médecine du monde afin d'échanger des connaissances et de participer à l'avancement des réseaux éducationnels, cliniques et de recherche.

Ma participation à l'élaboration des recommandations dans le cadre de l'initiative JAMLess m'a appris beaucoup et m'a remplie d'humilité. J'ai un immense respect pour mes collègues qui travaillent dans des milieux sans grandes ressources et qui poursuivent malgré tout leur apprentissage, animés d'une motivation, d'une persévérance et d'un dévouement inébranlables à faire avancer la rhumatologie dans leur pays et au- delà. Finalement, le monde est peut-être aussi petit qu'on le dit, mais il reste encore beaucoup de chemin à parcourir dans le domaine de la rhumatologie.

Référence :

1. Lau CS, Feng PH. Rheumatology without borders. Nat Clin Pract Rheumatol. juin 2007; 3(6):305.

Mercedes Chan, MBBS, MHPE, FRCPC
Professeure adjointe en pédiatrie,
Université de l'Alberta
Rhumatologue pédiatrique,
Hôpital pour enfants Stollery
Edmonton (Alberta)

Les membres du groupe de travail de l'initiative JAMLess photographiés en Afrique du Sud, juillet 2017. De gauche à droit, dernière rangée : Helen Foster (R.-U.), Carine Wouters (Belg.), Nicola Ruperto (It.), Ron Laxer (Can.), Ross Petty (Can.). Rangée du milieu : Gecilmara Peliggi (Brésil), Claudia Saal Magalhães (Brésil), James Chipeta (Zambie), Gail Faller (Afr. du Sud), Raju Khubchandani (Inde). Première rangée : Frances Furia (Tanz.), Ricardo Russo (Arg.), Chris Scott (Afr. du Sud), Mercedes Chan (Can.), Waheba Slamang (Afr. du Sud).

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