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Printemps 2017 (volume 27, numéro 1)

Dix points que les rhumatologues devraient savoir sur les maladies inflammatoires de l’intestin

Par Heba M. Al-Farhan, M.D., MRCP; et Gilaad G. Kaplan, M.D., MPH, FRCPC

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Les maladies articulaires sont les manifestations extra-intestinales les plus courantes des maladies inflammatoires de l’intestin (MII), touchant 30 % des patients atteints de la maladie de Crohn ou de colite ulcéreuse1. Le présent article examine les considérations liées aux patients atteints d’arthrite et d’une MII coexistante.

1. Arthrite périphérique associée à une MII

Il existe deux types distincts d’arthrite. Le TYPE 1 est non érosif, asymétrique et il touche moins de cinq grosses articulations. L’arthrite est liée à l’activité de la maladie intestinale sous-jacente, se manifestant possiblement avant l’apparition des symptômes intestinaux. On prend en charge l’arthrite en traitant la poussée aiguë de la maladie de Crohn ou de la colite ulcéreuse2. Le TYPE 2 frappe plusieurs articulations et il est symétrique; il est moins souvent lié à l’activité de la maladie intestinale.

2. Arthropathie axiale et MII

Le risque de sacro-iliite et de spondylarthrite ankylosante chez les patients atteints de MII est de 10 % et 3 %, respectivement1. De même, 4,1 % des patients atteints de spondylarthrite ankylosante présentent une MII coexistante3. Le traitement de la MII n’a pas de répercussion sur l’évolution naturelle de l’arthropathie axiale2.

3. Évaluation d’un nouveau diagnostic de MII

Les patients atteints de spondylarthrite peuvent présenter des symptômes gastro-intestinaux actifs (p. ex. douleurs abdominales, diarrhée, hémorragies rectales). Les considérations non liées à une MII comprennent l’entéropathie liée aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), les infections gastro-intestinales, y compris les infections à Clostridium difficile et la maladie cœliaque4.

4. Diagnostic de la MII

La coloscopie avec biopsies est nécessaire pour le diagnostic de la MII. Les modalités de l'imagerie de l’intestin grêle comprennent l’échographie avec injection d’un agent de contraste, l’entérographie par résonance magnétique et l’entérographie par TDM. Dans le cas de la MII, on devrait éviter la TDM de l’abdomen à moins d’avoir éliminé le risque de complications intestinales (p. ex. perforation ou occlusion).

5. Prise en charge de la douleur

Les AINS sont associés à un risque accru de déclenchement d’une poussée de la MII. L’acétaminophène est une option thérapeutique sûre pour la prise en charge de la douleur chez les patients atteints d’une MII5.

6. Traitement d’une poussée aiguë au moyen de stéroïdes

On prescrit la prednisone à raison de 40 mg par jour pendant une semaine, suivi d’une réduction de la dose de 5 mg par semaine. Les patients atteints de la maladie de Crohn limitée à l’iléon ou au colon droit peuvent utiliser le budésonide oral, qui a moins d’effets secondaires systémiques. Le budésonide MMX (multi-matrix system) est une préparation, qui prolonge la libération du budésonide tout le long du colon au moyen de la technologie MMX, et peut traiter une poussée de colite ulcéreuse6.

7. Traitement de la MII au moyen de la sulfasalazine et des 5-aminosalicylates (5-ASA)

La sulfasalazine et les 5-ASA (mésalamine) sont efficaces pour le traitement de la colite ulcéreuse, mais les données sont moins solides dans le cas de la maladie de Crohn. Les médicaments à base de 5-ASA sont offerts sous forme de comprimés oraux, de lavements rectaux et de suppositoires. La composition et l’enrobage de chaque médicament sont légèrement différents afin de permettre au médicament d’atteindre différentes parties de l’intestin7.

8. Immunomodulateurs

Le méthotrexate, l’azathioprine et la 6-mercaptopurine sont inefficaces pour induire une rémission de la MII. Ils sont utilisés à la suite d'un traitement d'induction (p. ex. au moyen de stéroïdes) ou en association avec un agent anti-FNT (facteur de nécrose tumorale) pour réduire l’immunogénécité. Chez les patients présentant une mutation génétique touchant l’enzyme thiopurine methyltransférase (TMPT), on doit réduire la dose (hétérozygote) ou éviter (homozygote) l’azathioprine ou la 6-mercaptopurine8.

9. Traitements anti-FNT

L’infliximab est utilisé chez les patients souffrant de la maladie de Crohn et chez ceux atteints de colite ulcéreuse : 5 mg/kg aux semaines 0, 2 et 6, suivi d’une dose d’entretien toutes les 8 semaines. L’adalimumab est utilisé chez les patients souffrant de la maladie de Crohn et chez ceux atteints de la colite ulcéreuse : semaine 0, 160 mg; semaine 2, 80 mg; ensuite 40 mg toutes les deux semaines. Le golimumab est utilisé chez les patients atteints de la colite ulcéreuse : semaine 0, 200 mg; semaine 2, 100 mg; ensuite 100 mg toutes les 4 semaines. Le certolizumab n’est pas approuvé au Canada pour la MII. L’étanercept n’est pas efficace pour le traitement de la MII8,9.

10. Nouveaux produits biologiques liés à la MII

Le vedolizumab est un anticorps dirigé contre l’intégrine α4β7 pour le traitement de la maladie de Crohn et de la colite ulcéreuse. Le vedolizumab est le premier agent biologique anti-inflammatoire sélectif de l’intestin8,9. Son rôle dans la prise en charge de la spondylarthrite coexistante demeure inconnu.

Références :

1. Karreman MC, Luime JJ, Hazes JM, Weel AE. The prevalence and incidence of axial and peripheral spondyloarthritis in inflammatory bowel disease: a systematic review and meta- analysis. J Crohns Colitis 2016.

2. Harbord M, Annese V, Vavricka SR, et coll. The first european evidence-based consensus on extra-intestinal manifestations in inflammatory bowel disease. J Crohns Colitis 2016; 10(3):239-254.

3. de Winter JJ, van Mens LJ, van der Heijde D, Landewe R, Baeten DL. Prevalence of peripheral and extra-articular disease in ankylosing spondylitis versus non-radiographic axial spondyloarthritis: a meta-analysis. Arthritis Res Ther 2016;18:196.

4. Danese S, Fiorino G, Mary JY, et coll. Development of red flags index for early referral of adults with symptoms and signs suggestive of Crohn's disease: an IOIBD initiative. J Crohns Colitis 2015;9(8):601-606.

5. Takeuchi K, Smale S, Premchand P, et coll. Prevalence and mechanism of nonsteroidal anti-inflammatory drug-induced clinical relapse in patients with inflammatory bowel disease. Clin Gastroenterol Hepatol 2006;4(2):196-202.

6. Rezaie A, Kuenzig ME, Benchimol EI, et coll. Budesonide for induction of remission in Crohn's disease. Cochrane Database Syst Rev 2015(6):CD000296.

7. Wang Y, Parker CE, Feagan BG, MacDonald JK. Oral 5-aminosalicylic acid for maintenance of remission in ulcerative colitis. Cochrane Database Syst Rev 2016(5):CD000544.

8. Hazlewood GS, Rezaie A, Borman M, et coll. Comparative effectiveness of immunosuppressants and biologics for inducing and maintaining remission in Crohn's disease: a network meta-analysis. Gastroenterology 2015;148(2):344-354 e345; quiz e314-345.

9. Vickers AD, Ainsworth C, Mody R, et coll. Systematic review with network meta-analysis: comparative efficacy of biologics in the treatment of moderately to severely active ulcerative colitis. PLoS One 2016;11(10):e0165435.

Heba Al-Farhan, M.D., MRCP
Chercheur en MII au stade avancé
Université de Calgary
Gastro-entérologue,
Foothills Medical Center,
Calgary (Alberta)
Hôpital Amiri (Koweit)

Gilaad G. Kaplan, M.D., MPH, FRCPC
Professeur agrégé,
Université de Calgary
Gastroentérologue,
Centre médical Foothills
Calgary (Alberta)

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